Les lanceurs d'alerte
Nous avons vu dans une fiche précédente comme la société post-moderne avait connu des mutations fondamentales conduisant à une crise des valeurs.
Et cette société se développe dans un nouvel espace qui n’est plus celui des États, mais celui que les alliances économiques dessinent. En effet, La marge d'action des États est de plus en plus réduite par des accords économiques internationaux pour lesquels les citoyens ne sont ni consultés, ni informés.
Et ce n’est pas à leur avantage puisque dans cette course au capital, l’homme devient lui aussi source de marchandisation. Les « algorithmes » généralisés à tout y compris à nos habitudes de consommation et revendus au plus offrants constituent le sommet de l’iceberg. Et pour cela, un contrôle toujours accru de la vie privée et une surveillance numérique omniprésente.
C’est dans ce contexte ultra-libéral que sont apparus les « lanceurs d’alerte » — expression née dans les années 1990 sous la plume des sociologues Francis Chateauraynaud et Didier Torny — dont la « mission » est de dénoncer les dérives d’un système. Quand l'argent détourne la loi de sa fonction, la défense de l'intérêt général, il existe un droit, voire un devoir de désobéissance. C'est ce que font les "lanceurs d'alerte", obéissant à leur conscience, leur raison quand les ordres ou les lois s'écartent de la justice et de l'intérêt des citoyens.
Il devient nécessaire de désobéir quand la démocratie, gangrénée par une collusion entre argent et pouvoir n'oeuvre plus le bien-être du peuple.
Le lanceur d’alerte est une personne qui, dans le contexte de sa relation de travail, signale un fait illégal, illicite et dangereux, touchant à l’intérêt général, aux personnes ou aux instances ayant le pouvoir d’y mettre fin.
Les lanceurs d’alerte oeuvrent, depuis une cinquantaine d’années, pour améliorer l’information des citoyens et ont empêché certains scandales. En bref, de préserver le fonctionnement démocratique lorsqu’il est menacé par des enjeux économiques et financiers qui le dépassent.
Lesdomaines qui peuvent faire l'objet d'alerte sont très divers :
- Santé (amiante, sang contaminé, vache folle, Médiator),
- Environnement (sous-marins nucléaires russes déclassés, pollutions industrielles, OGM),
- Économie (marchés truqués, pratique des multinationales de l'eau),finances publiques (corruption),
- Libertés individuelles (camp de rééducation en Chine, système d'écoute Prism),
Du fait de la notion d'intérêt général qui le motive, le lanceur d'alerte se distingue de :
- L'espion, en raison de son indépendance,
- La taupe, car son action n'est ni préméditée ni intéressée,
- L'alarmiste, car il ne cherche pas à attirer l'attention sur sa personne mais sur sa cause,
- Le dénonciateur qui dénonce à une autorité ou à la justice.
- Le délateur "qui dénonce pour des motifs méprisables",
- Le cafard ou le mouchard qui dénonce hypocritement, sournoisement.
Parmi les lanceurs d'alerte les plus connus : Julian Assange qui a fondé Wikileaks, Edward Snowden, qui a dévoilé des informations top secrètes de la NSA, Hervé Falciani, qui a ébranlé la banque HSBC dans le cadre de l'affaire «SwissLeaks», ou encore Antoine Deltour qui a déclenché le scandale «LuxLeaks».
Comme en témoignent de nombreux exemples dans l’actualité, ils restent la cible d’intimidations, de menaces et de représailles : licenciement, procès en diffamation, harcèlement…
Leur statut est actuellement débattu en France à l’Assemblée nationale par les députés…
Sources :
- http://www.toupie.org/Dictionnaire/Lanceur_alerte.htm
- https://transparency-france.org/lanceurs-dalerte/
- Hartmann Florence. Lanceurs d’alerte : les mauvaises consciences de nos démocraties. Edition Don Quichotte. 2014)
- Bourdon William, Petit manuel de désobéissance civile. Lattès. 2014
- Lagasnerie, Geoffroy de. L’art de la révolte : Snowden, Assange, Manning. Fayard. 2015